Un concurrent de Blablacar dévoile une étude intéressante sur la pratique du covoiturage qui, dans certains cas, peut se montrer contre-productive.
L’étude est intéressante puisqu’elle soulève un point rarement abordé au sujet du covoiturage. Et Karos n’y va pas par quatre chemins : « En conclusion, le covoiturage domicile-travail détient tous les atouts pour générer des bénéfices écologiques immenses. A une condition néanmoins : que le “court-voiturage intermodal” soit délibérément favorisé face au « tout-voiture ». Les pouvoirs publics et les collectivités locales sont donc invités à passer sans attendre à la vitesse supérieure et à ne pas se tromper de voie ! ». Pourquoi un spécialiste du covoiturage se lance-t-il dans une étude à la limite de la dénonciation des mauvais effets de cette pratique qui prend de l’ampleur ? La raison est simple : Karos est un concurrent de Blablacar, mais à la différence de la plus célèbre plateforme de covoiturage, Karos est bien plus spécialisée.
« Moins connue du grand public que la licorne française du covoiturage longue distance, Karos réalise pourtant en Île-de-France ou dans certaines métropoles comme Toulouse davantage de trajets que cette dernière sur le créneau très spécifique des trajets domicile – travail ». Le créneau de Karos, c’est donc avant tout le domicile-travail, et pas vraiment le covoiturage pour les vacances et les loisirs, à la grande différence de Blablacar. C’est une précision importante pour ce qui va suivre !
Le covoiturage, vraiment bon pour l’environnement ?
Pour justifier le fait que le covoiturage n’est pas forcément la panacée, Karos s’appuie sur deux phénomènes : l’effet « d’usage », et l’effet de « substitution ». Le premier se résume en fait à utiliser plus souvent le covoiturage pour des déplacements personnels non indispensables car il est moins cher que les transports en commun. Le second est le fait de remplacer ses trajets en transport en commun par du covoiturage, là encore pour des raisons économiques. Dans les deux cas, cela tend à augmenter le nombre de voitures sur les routes. Deux personnes qui covoiturent alors qu’elles pourraient faire autrement, c’est tout de même une voiture de plus sur la route !
Concrètement, Karos pointe du doigt le fait que le covoiturage augmente in fine les trajets en voitures en France pour des trajets non « contraints ». En gros, tous les déplacements qui ne sont pas ceux pour se rendre au travail. Et même dans ce cas de figure, le covoiturage peut perdre ses bénéfices environnementaux. Explications.
La question est la suivante. A l’instar de la concurrence de Blablacar face à certaines lignes de train, un covoiturage domicile – travail mal encadré par les pouvoirs publics pourrait-il venir concurrencer voire « siphonner » plus massivement les utilisateurs d’un axe de transport en commun ? En très grand nombre, des passagers, ex-utilisateurs de transports en commun, risqueraient dans un tel scénario de « voler » les places aux « bons passagers », ceux pour qui le covoiturage était un moyen de laisser leur voiture au garage. Conséquence directe, la fréquentation et les recettes liées à cette ligne de transport en commun s’effondreraient. Les investissements financiers nécessaires ne pourraient plus être programmés, la fréquence de la desserte serait probablement diminuée, accélérant à son tour la dégradation de ce transport en commun ».
Un point de vue intéressant rarement évoqué ! Malheureusement, Karos ne quantifie pas ces personnes qui covoiturent alors qu’elles pourraient prendre les transports en commun. Il aurait été intéressant de connaître l’impact réel (en rejets CO2 et en pertes financières pour les réseaux de transports en commun) de ces covoiturages qui entrent en concurrence directe avec des modes de déplacement moins carbonés. Dommage. Mais encore faut-il que l’offre de transports en commun soit suffisante, de qualité et dimensionnée correctement. Et ça, c’est une autre histoire.
source : www.automobile-magazine.fr